Scoprobat investit dans son développement

Scoprobat investit dans son développement

L’entreprise d’insertion Scoprobat vient d’investir 2,7 millions d’euros dans la reconstruction de son siège strasbourgeois. Le bâtiment, qui sera inauguré ce soir, permettra à la coopérative de renforcer la dynamique économique qu’elle a créée dans le quartier du Neuhof.

EN DÉCEMBRE 2013, le maire de Strasbourg Roland Ries était venu donner le coup d’envoi des travaux. Il devrait se déplacer à nouveau ce soir, cette fois pour inaugurer le résultat de vingt mois de chantier : un bâtiment élégant, lumineux, doté d’un étage supplémentaire et d’un patio central végétalisé, qui n’a rien, mais alors plus rien à voir avec les anciens locaux de Scoprobat.

La coopérative, née il y a quatre ans de la fusion de Bati-Scot, Scoproxim et Proxim Point Lavande, trois entreprises d’insertion par l’économique installées depuis trente ans au coeur du quartier du Neuhof, a en effet décidé il y a deux ans « d’améliorer et de pérenniser (son) outil de travail », explique son PDG Michel Sexauer. L’ancienne supérette de Coop Alsace qui abrite ses activités avait, il est vrai, grand besoin d’être rénovée.

« Nous aurions pu nous installer dans l’une des nouvelles zones artisanales » de la ville. « Cela nous aurait sans doute coûté moins cher », reconnaît-il. Pourtant, « nous avons fait le choix éthique de rester au coeur du quartier ». Parce que l’entreprise spécialisée dans le nettoyage et les services associés y compte des clients, comme par exemple CUS Habitat qui lui a confié le nettoyage des entrées d’immeubles et des espaces verts, parce qu’elle y recrute une partie de ses 94 salariés (dont 64 postes d’insertion) et aussi qu’elle estime avoir toujours un rôle à y jouer. « Depuis 34 ans, nous avons créé dans le quartier une dynamique économique », résume M. Sexauer.

Mettre l’homme au coeur de l’entreprise

La coopérative a en tout cas choisi de ne pas faire les choses à moitié. Elle a consacré à ce projet, confié au cabinet d’architectes Rey et Lucquet, 2,7 millions d’euros, presque l’équivalent de son chiffre d’affaires annuel (2,485 millions d’euros en 2014). Le prix du rehaussement et du réaménagement du bâtiment, de l’acquisition des terrains attenants et de la construction sur ces derniers d’un parking et d’annexes dédiées au stockage des machines.

Ces travaux, dont près de 15 % du volume horaire a été réalisé par des salariés en insertion, ont été financés à 50 % en fonds propres, précise M. Sexauer. « Chaque année,
explique-t-il, la moitié de notre résultat est répartie entre les salariés et l’autre moitié est réinvestie dans l’outil de travail. Or notre activité n’est pas très gourmande en matériel. » Au fil des années, la SCOP avait donc constitué des provisions.

Ce nouveau siège « est pour nous une carte de visite », souligne le PDG de la SCOP qui réalise 20 % de son chiffre d’affaires dans le bâtiment (peinture intérieure, pose de
revêtements de sol, finitions, etc). Pas inutile pour conclure des nouveaux marchés. Surtout, « nous disposons à présent des locaux les plus adaptés possibles à nos activités
». C’est toujours la propreté (nettoyage de locaux industriels, de bureaux, de voies publiques) qui représente l’essentiel de son chiffre d’affaires (80 %). Dans cette activité, « nous avons progressé  de 10 à 15 % ces dernières années malgré la conjoncture très difficile », se félicite Michel Sexauer. La SCOP s’emploie également à « développer des concepts et à proposer des idées nouvelles » pour conforter ses résultats mais aussi servir de support aux parcours d’insertion de ses salariés et augmenter leurs chances de trouver un débouché professionnel.

Elle s’est ainsi dotée d’une nouvelle compétence : la gestion du barriérage des chantiers. « C’est nous qui posons, ramassons et gérons toutes les barrières rouges et blanches » qui balisent les travaux du tram dans l’Eurométropole de Strasbourg, explique le dirigeant.
Pour lui, c’est clair : « Sans la forme coopérative, nous ne serions pas là où nous sommes aujourd’hui. Les valeurs inscrites dans nos statuts et mises en oeuvre tous les jours (« prise de décision démocratique, répartition des résultats, pérennisation et développement de l’outil de travail dans un but productif affranchi des travers du capitalisme classique ») ont créé une réelle dynamique ». La coopérative d’insertion compte bien poursuivre sur cet élan.

Ce soir, ses invités pourront découvrir aussi le travail du photographe Xavier Schwebel qui a suivi les équipes de Scoprobat dans leur travail et qui exposera ses clichés sur les murs de l’entreprise à l’occasion du mois de l’économie sociale et solidaire. Une manière pour la SCOP de mettre, une fois plus, les salariés au coeur de son projet.

R. ODILE WEISS
PHOTO DNA – MICHEL FRISON